MicroFoucault n° 26 : tâtonnements et données techniques. (Part 3)

11 septembre, minuit. EX-CE-LLENT! 16 heures pour une demi-révolution, soit 32 heures pour une révolution entière. 4% d’erreur.

12 septembre: 13 heures, 29 heures pour une révolution complète soit 14% plus rapide que ce qu’il devrait sous ma latitude (33h26).

Lancement d’un test longue durée de deux semaines sans aucune intervention externe.

Les coulisses de l’exploit… La caméra et le Raspberry sont en haut, et en bas se trouve le PC avec MicroSet enregistrant les données.

15 septembre: A fait sa dernière révolution complète en 30 heures : 10% trop rapide, mais ça s’améliore gentiment.

16 septembre: A fait sa dernière révolution en 30 heures : toujours 10% trop rapide.

17 septembre: A fait sa dernière révolution en 32 heures : seulement 4% trop rapide!

18 septembre: dernière révolution en 32 heures : excellent!

Le graphique sur quatre jours est extrêmement intéressant car on peut constater qu’il évolue au fil des jours:

On peut voir que la courbe s’aplatit de plus en plus au point que, si ça continue ainsi, devrait devenir beaucoup plus linéaire et les temps de révolution descendre bientôt en-dessous de 10%. Ces courbes peuvent sembler un tantinet anarchique et fluctuante, certes, mais sont une immense victoire pour un pendule de Foucault aussi minuscule.

19 septembre: dernière révolution en 30 heures. De nouveau 10% trop rapide.

20 septembre: 30 heures.

21 septembre: 32 heures.

22 septembre: 30 heures.

Exemple de la signature d’une révolution complète:

27 septembre: fin du test après 15 jours:

…où l’on peut voir qu’il a fait 24 demi-révolutions, soit 12 révolutions complètes sur 170 heures, ce qui nous donne environ 29 heures en moyenne (au lieu de 33). On constate aussi que l’amplitude du balancier se stabilise peu à peu au fil des jours. Voici la vidéo de ces 15 jours de tests:

…où l’on peut constater que ce pendule avait une admiratrice cachée: une araignée qui vient le regarder au fil des jours!!! Mais si l’on note les heures où le pendule est à 0° (midi), nous auront les périodes de demi-révolutions suivantes:

Ce résultat peut être très facilement amélioré en continuant de peaufiner les réglages pour corriger la course du pendule entre -70° et -20°, l’endroit où il tourne trop rapidement. La précision pourrait ainsi descendre sous la barre des 10%. Mais il faut savoir s’arrêter.

28 septembre 2024: c’est le moment de conclure cette expérience-là car elle a duré 5 mois et d’autres ont maintenant besoin de mes appareils de mesures et de mon temps. Je vais tout démonter pour enfin remettre ma cuisine et mon salon en ordre, et l’araignée va devoir se trouver un autre nid, elle qui nichait tout ce temps sous le pendule.

L’indomptable : les acquisition de données .

Comment est mesurée sa rotation?

Une caméra RPI HQ est raccordée à un Raspberry tournant sous Rasbian (Linux). Le logiciel de prise de vues est Allsky, qui se télécharge ici: https://github.com/AllskyTeam/allsky. C’est un logiciel astronomique de prises de vues d’astéroïdes, satellites, etc. Vu que c’est l’été, je l’ai paramétré comme s’il était au pôle sud, histoire de lui faire croire qu’il fait nuit tout la journée… La caméra est cadencée à raison d’une image d’une seconde prise chaque heure pour en faire un time-lapse. Allsky est aussi un serveur internet qui permet de voir en direct la position du pendule depuis n’importe quel écran. Un petit catadioptre est collé sur le pendule, ce qui donne le trait blanc sur la photo. L’ensemble est éclairé par une seule LED et complètement isolé derrière des tissus noirs. J’insérerai ensuite une mire graduée sur le time-lapse pour ainsi savoir heure après heure la position exacte du pendule durant toute la durée de l’expérience, laquelle pourrait durer un mois.

Comment est mesurée la période d’oscillation du pendule?

Dans un des cas, c’est le contact du fil contre l’anneau de Charron qui déclenche le timer, un contrôleur MicroSet. Il enregistre chaque oscillation avec une précision d’un millionième de seconde. Comme l’amplitude du balancier n’est pas la même en fonction de sa position qui change sans arrêt, le graphique indiquera une courbe récurrente que l’on retrouve à chaque demi-rotation. C’est la signature du pendule, complètement différente pour chacun. On peut ainsi mesurer le temps de rotation du pendule et sa position à chaque moment donné. Ce système peut surtout mesurer le centrage de l’anneau de Charron.

L’image ci-dessous montre 24 heures dans la vie du MicroFoucault. Chaque crête montre une révolution du pendule. (les traits qui traversent le graphique ne comptent pas: ce ne sont que des mauvais contacts de l’anneau de Charron)

On peut en déduire:

  • Qu’il a tourné en 24 heures,
  • que les pics arrivent quand le pendule est sur l’axe X,
  • que les bosses arrivent quand le pendule se trouve sur l’axe Y.

Dans l’autre cas, je récupère l’impulsion donnée par l’électro-aimant pour déclencher le timer. Cette formule est beaucoup plus précise que le contact électrique de l’anneau de Charron.

Pourquoi toutes ces mesures sont-elles si chronophages ?

Parce que chaque réglage doit attendre 17 heures, une demi-rotation sous ma latitude, avant que ses données ne soient validées.

C’est le prix à payer. Or toute expérience scientifique doit être reproductible. Ce qui nous donne 34 heures minimum.

Mais si l’on voulait être honnête, on devrait refaire chaque expérience à l’envers pour revenir aux données d’origine: 34 heures donc, plus 17 pour confirmer la modification: 51 heures…

Et si l’on voulait être parfaitement honnête, on ferait l’expérience sur une rotation complète pour confirmer la demi-rotation. Ce qui nous donne 102 heures….

En un mot: 4 jours simplement pour savoir de quoi l’on parle après le moindre réglage. Multipliez tout ça par le nombre de modifications, et nous ne parlerons plus alors en jours, mais en mois!

Comment centrer l’anneau de Charron et l’électro-aimant?

Les deux centrages sont effectués par 4 vis placées en X autour de l’anneau de Charron d’une part, et autour de l’électro-aimant d’autre part. Les brutes tentent souvent de mesurer avec une règle graduée, mais ça tient plus du bricolage que d’autre chose. Voici la façon absolue d’être juste: un chronomètre mesurant chaque oscillation au millionième de seconde. Dans mon cas, j’utilise un timer MicroSet.

Si l’on reluque bien le graphique ci-dessous, on voit qu’avant le réglage 1, une mesure sur deux est plus courte que l’autre. Le réglage 2 peaufine le résultat final.

Toujours commencer par l’anneau de Charron, tellement plus difficile à régler, et finir par l’électro-aimant. Compter entre une bonne demi-journée et une journée entière de réglages avant d’être satisfait du travail.